Au-delà du problème d’approvisionnement et de commercialisation, le secteur a besoin plus que jamais d’un soutien tout particulier. Cela s’explique par son faible niveau tant proactif que réactif, face à la difficile équation de l’offre et de la demande.
Le rideau est tombé, dimanche, sur la 40e édition du Salon de la création artisanale, tenu du 24 mai au 2 juin au Kram, à l’initiative de l’Office national de l’artisanat (ONA), sous le signe de «40 ans d’excellence». Qu’en reste-t-il ?
Perception globale
Dix jours durant, la foire a créé l’évènement et permis à un millier d’artisans de bien s’exposer auprès d’un grand nombre de clients et visiteurs, toujours fidèles à ce secteur pour sauvegarder nos traditions. «On n’a pas pu, certes, saisir pleinement l’opportunité, mais on en a, quand même, tiré profit. Nous sommes parvenus à vendre certains produits, même si beaucoup de clients nous semblent réticents face aux prix proposés…», nous confie un des exposants, alors qu’il s’apprête à plier bagage. Son témoignage puise dans l’idée maîtresse que l’on se fait généralement de notre artisanat, mais aussi résume, en quelque sorte, la perception globale que développe le marché local pour un but promotionnel.
Bien qu’il garde encore son éclat, le produit artisanal demeure plutôt hors de portée. Tout compte fait, son coût de conception et de fabrication, aussi cher soit-il, ne doit en aucun cas justifier l’envolée des prix. A tel point que l’on ne peut plus l’acheter. Et même un budget relativement conséquent, mis à cet effet, n’est guère suffisant pour s’offrir un beau tapis de salon, un bibelot ou même un simple cadeau en guise de souvenir. La qualité se paie, cela est évident ! Et tout produit fait main le mérite certainement, car de gros efforts sont déjà consentis. Avec autant de temps et d’énergie généreusement fournis. Il incarne, à la fois, authenticité et modernité, ce qui a forcé son estime et sa considération.
Il mérite un soutien particulier
Pour être digne de ce nom, notre artisanat doit faire sa promotion, car il en vaut bien la peine, d’autant plus que la formation et le soutien aux artisans s’avèrent encore de mise. En dépit des difficultés et des crises en cascade qui l’ont frappé de plein fouet, l’artisanat tunisien semble avoir survécu à tous les coups et contrecoups. Il tient encore bon, du fait qu’il a dû épouser son temps et évoluer vers un modèle de conception et de production quasi-atypique. Voire un secteur qui sort de l’ordinaire, fidèle à ses traditions ancestrales et dépositaire d’un imaginaire socioculturel identitaire.
40 ans déjà, ce salon, dirait-on, arrive à un stade de maturité, où artisans et artisanes ont raison de voir grand et de s’intégrer dans un processus créatif, incitatif à l’innovation et à toute forme de promotion. A vrai dire, ils ont droit à se tailler une part du marché, étant donné que ce secteur contribue, aujourd’hui, à hauteur de 5% au PIB. L’année dernière, il a rapporté, en devises, 150 millions de dinars.
Au-delà de sa crise d’approvisionnement et de commercialisation, le secteur aurait besoin plus que jamais d’un soutien tout particulier. Cela s’explique par son faible niveau tant proactif que réactif, face à la difficile équation de l’offre et de la demande. Notre artisanat se voit, alors, attiré par une économie de marché, sans bien-fondé et loin d’être étudiée. Faute de bonne stratégie de marketing et d’une politique de vente réfléchie, nos professionnels et commerçants ont du mal à écouler leurs produits à l’échelle locale. Et encore moins sur le marché international, sous l’effet d’autres concurrents des plus acharnés. Et puis, consommer local, c’est savoir, tout d’abord, agir sur les clés de voûte de commercialisation.